mercredi 16 juillet 2014

Pour un Audit de la Dette Egyptienne.



Pour un Audit de la Dette Egyptienne.
Tarek EZZAT

Après la crise financière, révélée en 2008, certains pays se trouvèrent dans l’incapacité de faire face à leurs échéances.
Les exemples les plus impressionnants étaient la Grèce, et Chypre. Mais l’Espagne, l’Italie et, dans une moindre mesure, la France, ont connu de graves difficultés.
Dans ce climat de panique, seul un petit pays a résisté : l’Islande.
Ce pays, et son peuple courageux, ont considéré que la dette était la conséquence de manipulations illicites. Alors l’Islande, après avoir organisé un référendum, a refusé le remboursement de sa dette et traduit en justice les responsables de l’endettement du pays.
Bien longtemps avant ces événements, l’Argentine avait aussi refusé de payer sa dette, et le Brésil avait menacé de suivre son exemple.




Pourquoi l’Égypte de suivrait elle pas l’exemple Islandais ?

On sait que l’Égypte souffre d’une économie exsangue. Le gouvernement, sous les coups de boutoir du FMI, de la Banque Mondiale et les puissances occidentales (celles-là mêmes qui soutenaient la confrérie islamiste) a déjà entrepris de diminuer les subventions sur les produits de première nécessité, en attendant de les supprimer.
Des ministres, qui prennent les citoyens pour des imbéciles, nous expliquent que la hausse du prix de l’essence n’aura aucun effet sur le prix des denrées alimentaires et les autres produits, dont les prix resteront stables.
Ces ministres sont des analphabètes politiques. Ils me rappellent ce que Bertolt Brecht disait à leur propos :
Le pire des analphabètes, c’est l’analphabète politique. Il n’écoute pas, ne parle pas, ne participe pas aux événements politiques. Il ne sait pas que le coût de la vie, le prix de haricots et du poisson, le prix de la farine, le loyer, le prix des souliers et des médicaments dépendent des décisions politiques. L’analphabète politique est si bête qu’il s’enorgueillit et gonfle la poitrine pour dire qu’il déteste la politique. Il ne sait pas, l’imbécile, que c’est son ignorance politique qui produit la prostituée, l’enfant de la rue, le voleur, le pire de tous les bandits et surtout le politicien malhonnête, menteur et corrompu, qui lèche les pieds des entreprises nationales et multinationales.

On a donc des analphabètes politiques au gouvernement, … mais ont fait avec ce qu’on a. Faute de mieux.

Nous savons que l’Égypte a vécu sous un régime corrompu. Nous savons que quelques oligarques de la bourgeoisie compradore détournaient l’argent de la dette à son profit, quand elle ne faisait pas carrément main basse sur cette manne, supposée soutenir des projets de développement ou des accords d’expansion économique.

On raconte depuis longtemps une ‘nokta’ (blague) selon laquelle un ministre des travaux publics Égyptiens aurait rendu visite à un homologue Africain. Devant un pont nouvellement construit, le ministre africain demande à l’égyptien :
-          tu vois le pont là-bas ? 
-          oui !
-          50% dans ma poche !
Quelques semaines plus tard, c’est au tour du ministre Africain de venir en Egypte. Le ministre égyptien lui demande :
-          Tu vois le palais des congrès là-bas ?
-          … euh ! non. Je ne vois rien !
-          100% dans ma poche !

La situation est grave. Aujourd’hui, l’Égypte compte essentiellement sur le soutien financier de l’Arabie Saoudite, c’est-à-dire sur le régime Wahhabite qui soutient et finance les Salafistes et leur nébuleuse de prédicateurs obscurantistes.
Pour desserrer ce carcan, le Président Sissi a voulu inciter les oligarques à contribuer au sauvetage de l’économie. Il a donc donné l’exemple en cédant la moitié de sa fortune et de son salaire au Trésor Public. Certains hommes d’affaires ont suivi, ainsi qu’un grand nombre de citoyens modestes.
Mais après ?

Peut-on, sur la durée, faire vivre un pays comme l’Égypte avec des subventions Wahhabites et de la charité bourgeoise ?
Que fera-t-on l’année prochaine ?


Si la classe aisée a reconstitué son patrimoine, pour pouvoir contribuer à nouveau, c’est qu’elle aura certainement pillé les richesses du pays. Et si la situation n’aura pas fondamentalement changé, alors cette classe aurait dilapidé son patrimoine pour un rien.
Je propose que l’Egypte organise un audit de sa dette. Cet audit doit être indépendant et international. Il pourrait être confié à des experts reconnus, comme par exemple Jean Ziegler, Hongbing Song, et Thomas Piketty. Des organisations non gouvernementales pourraient y participer, comme ‘Transparency International’. Des universitaires ou des personnalités Africaines, comme Chérif Salif Sy ou Aminata Traoré.
Les organisations susceptibles d’avoir tiré profit de l’endettement de l’Egypte devront, bien sûr, en être écartées, comme le FMI ou la Banque Mondiale.
Pour des raisons évidentes de conflit d’intérêt, il ne faudra pas que des Egyptiens participent à cette entreprise.
Le but de l’audit serait de terminer le montant de chaque dette, ses conditions, et son utilisation. Il devra ensuite procéder à un classement de ces dettes.
Les bonnes dettes seraient celles qui auraient effectivement contribuées au développement du pays.
Les autres, qui auraient servir à alimenter la corruption, seraient dénoncées, et l’Egypte pourrait alors déclarer que ces dettes ne seront pas remboursées.
Ce qui est sûr, c’est que cette démarche permettra de diminuer considérablement la dette du pays. Permettre de financer le développement en économisant les sommes réservée au service de la dette, et repartir sur des bases économiques claires et efficaces.
L’Egypte, et son gouvernement ont-ils la puissance économique et le courage politique d’entreprendre une telle démarche ?
Poser la question est y répondre.

 






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